Un scandale sur l’Olympe
Vénus, au contraire, conservait beaucoup de temps libre pendant les six mois où Adonis était aux enfers. Pour occuper ce temps, une femme ordinaire eût pris sans doute un autre amant. Vénus, elle, en prit deux d’un coup, Mars et Apollon. Cette double liaison était rendue possible par le fait que les deux dieux avaient des horaires différents et complémentaires :
Apollon, occupé toute la journée par la conduite du char du soleil, n’était libre d’aller retrouver Vénus qu’à la tombée de la nuit, cependant que Mars, comme tous les militaires, n’avait pas grand-chose à faire en temps de paix et passait la journée avec elle. C’est pourquoi aucun des deux ne se doutait qu’il avait un rival. Quant à Vulcain, surchargé de travail, il ignorait tout ; il s’étonnait seulement de constater que, depuis quelque temps, Vénus ne lui reprochât plus de trop travailler, et qu’elle l’accueillît désormais chaque soir, à son retour tardif, avec amabilité et bonne humeur. Ce ménage à quatre aurait pu durer très longtemps si, un jour, Mars ne s’était assoupi auprès de Vénus et n’avait laissé passer l’heure à laquelle il devait la quitter.
Apollon, ayant terminé sa tournée céleste, range son char et se rend discrètement à son rendez-vous quotidien. Lorsqu’il voit Vénus endormie entre les bras de Mars, son sang ne fait pas dix tours, ni cinq, ni trois, ni même deux : il n’en fait qu’un. Assoiffé de vengeance, Apollon court chez Vulcain et lui annonce que sa femme le trompe avec Mars. Vulcain tresse aussitôt un filet métallique à fines mailles, rentre en catimini à son palais et jette sur Vénus et Mars, qui dormaient tout nus, le filet ensorcelé qui les emprisonne. Puis il les traîne, dans cette humiliante position, jusqu’à l’Olympe où il invite à grands cris les dieux à venir les contempler et les couvrir de sarcasmes.
Malgré les supplications de Vénus et les pleurs de Mars, Vulcain se refusait obstinément à les libérer. Heureusement pour eux, une déesse aux doigts agiles et à l’intelligence profonde, inventrice, entre autres choses, des nœuds, eut pitié d’eux ; au prix de plusieurs heures de travail, elle parvint à découvrir le secret du filet et à le défaire. Cette déesse, c’était Minerve.